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Climat, nutrition, biomatériaux : les formidables promesses des algues

Sur les plages, les vacanciers les voient comme des nuisances. Sans toujours savoir que les algues pourraient apporter des solutions à de grands défis comme la séquestration du carbone ou la faim dans le monde. Un véritable or vert en puissance. A condition de réussir à bâtir une filière industrielle.

Récolte de wakamé, une algue comestible, sur l'île de Ré.
Récolte de wakamé, une algue comestible, sur l'île de Ré. (© Thomas Louapre / Divergence)

Par Stefano Lupieri

Publié le 15 juil. 2021 à 11:06Mis à jour le 16 juil. 2021 à 01:11

L'installation est un peu artisanale. Mais le spectacle n'en est pas moins fascinant. Des spécimens de Palmaria palmata virevoltent dans de grandes colonnes d'eau alimentées par une forêt de tuyaux flexibles et déploient leurs tentacules rouge amarante au gré des bulles qui agitent le milieu. Disposés dans une pièce sombre, ces aquariums verticaux sont entourés par des rubans de LED qui concentrent la lumière sur la paroi des tubes et aimantent le regard. On n'en apprécie que mieux les jeux de transparence et les nuances colorées de cette algue plus connue sous le nom vernaculaire de dulse.

« Dans la nature, cette espèce pousse accrochée aux rochers, explique d'une voix posée Philippe Potin, maître de recherches au CNRS. Mais, ici, nous nous efforçons de l'étudier dans un environnement en suspension. Avec pour objectif d'être bientôt capables d'en maîtriser les mécanismes de reproduction ». Ici, c'est à la Station biologique de Roscoff. Avec sa centaine de scientifiques dédiés, sans doute le centre de recherche sur les algues le plus pointu en Europe.

Une collection de 9.000 souches

Intarissable sur le sujet, Philippe Potin y est arrivé il y a trente ans pour sa thèse. Et il n'a plus jamais quitté l'endroit. Il est vrai que les bâtiments, dont le plus ancien remonte au XVIIe siècle, bénéficient d'une situation géographique d'exception avec une vue imprenable sur la baie et l'île de Batz. Pour prélever la ressource, il n'y a qu'à descendre sur la plage à marée basse. La station abrite l'une des plus riches collections d'algues au monde : près de 9.000 souches en tout.

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Le centre est équipé d'une batterie de congélateurs pour conserver ces spécimens jusqu'à moins 150 °C. « Nous pouvons ainsi répondre à tout moment aux demandes des chercheurs du monde entier. Mais aussi des entreprises », souligne Philippe Potin. Car, outre ses recherches fondamentales qui lui ont notamment permis de décrypter le génome d'une cinquantaine d'espèces d'algues, la station travaille en étroite collaboration avec les acteurs économiques dans le but d'améliorer les techniques de culture et d'extraction de principes actifs. Et favoriser ainsi l'émergence d'une filière industrielle.

Vue aérienne d'une ferme d'algues en Corée du Sud. 

Vue aérienne d'une ferme d'algues en Corée du Sud. © Nasa - Goddard

« Depuis que j'évolue dans ce secteur, je n'ai jamais constaté un tel engouement pour cette ressource », assure le chercheur. De fait, un peu partout dans le monde, de nouvelles applications sont en train d'être testées dans des domaines très variés, des biomatériaux aux biopesticides en passant par la santé ou l'alimentation humaine. Autant de secteurs en attente d'alternatives biosourcées pour remplacer leurs composants synthétiques.

Loin de l'image négative dont elles souffrent auprès des vacanciers pour cause de marées vertes, les algues seraient même aux yeux de certains la solution à de grands défis mondiaux comme la séquestration du carbone. 50 % de l'air que nous respirons, nous le devons en effet à leurs propriétés de photosynthèse qui leur permettent de fabriquer de l'oxygène en consommant du CO2. Leur teneur en protéines en fait également une réponse potentielle à la faim dans le monde. D'autant que, pour pousser, elles n'ont besoin que de lumière et de carbone. Un véritable or vert ! Encore faut-il réussir à lever les verrous qui empêchent la filière de passer à une plus grande échelle.

Un espoir de biocarburant

Car ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on nous fait miroiter le potentiel des algues. Après en avoir longtemps extrait de la soude puis de l'iode, la Bretagne les exploite depuis les années 1960 pour leurs alginates, ces sucres complexes qui forment leur membrane extracellulaire, utilisés comme texturants ou gélifiants dans l'industrie alimentaire et d'hygiène-beauté. Dans les années 1970-80, la filière a connu un premier boom autour des usages en cosmétique.

Mais c'est surtout comme biocarburants que ces végétaux marins riches en huiles ont suscité le plus d'espoirs. « Dans les années 2000, la hausse continue des cours du pétrole a donné du crédit à cette alternative et entraîné un véritable engouement chez beaucoup d'entrepreneurs, notamment aux Etats-Unis, raconte Jean-François Sassi, responsable des procédés et technologies des microalgues au CEA de Cadarache, qui a participé dès le début à cette aventure. Jusqu'à ce que la récession mondiale en 2008 provoque la chute du prix du baril et fasse éclater la bulle. » Même si Total ou Exxon poursuivent leurs recherches sur le sujet, pour l'instant, on ne sait toujours pas faire un biocarburant algal à un prix acceptable.

Extraction de microalgues dans les laboratoires d'AlgoSource. 

Extraction de microalgues dans les laboratoires d'AlgoSource.  © Jean Claude Moschetti/REA

Prudence, donc, lorsqu'on évoque les promesses des algues. D'autant que, loin de former un grand groupe homogène comme beaucoup l'imaginent, ces organismes présentent des caractéristiques très différentes selon leur lignée. Non seulement entre les deux grandes familles des macros et des microalgues. Mais aussi au sein même de chacune d'elles. « Il y a autant de différences génétiques entre une algue verte et une algue rouge qu'entre un éléphant et un champignon », ironise Philippe Potin.

Vertes, rouges, brunes: trois lignées bien distinctes

Tout a commencé par la symbiose entre un petit organisme unicellulaire et une bactérie photosynthétique. La première microalgue était née. Au fil de l'évolution, certaines d'entre elles se sont agglomérées pour former des macroalgues. Leur apparition remonte à environ 1,5 milliard d'années. Les vertes et les rouges se sont imposées en premier. Issues d'autres symbioses, les brunes ne sont arrivées qu'il y a environ 200 millions d'années. Loin de former une même famille, chaque lignée a des caractéristiques très différentes. Selon les espèces, elles peuvent proliférer par bouturage ou reproduction sexuée. S'accrocher à un support ou vivre en suspension. Les algues vertes, dont sont issues toutes les plantes terrestres, ont des cycles de vie très courts, de quelques semaines. Les brunes peuvent durer plus de dix ans. Entre les deux, les rouges adoptent plutôt de cycles annuels. Trois univers distincts dont il nous reste encore beaucoup à découvrir.

Aujourd'hui, on estime à quelques dizaines de milliers les espèces de macroalgues présentes dans la nature et à quelques centaines de milliers celles de microalgues d'eau douce ou salée. Mais on n'en a encore étudié qu'un nombre infime. Et on en exploite encore moins. L'un des premiers enjeux pour passer à l'échelle industrielle, c'est d'être capable de les cultiver. En Asie, où elles sont consommées fraîches, on sait les produire en masse. De fait, sur 36 millions de tonnes cultivées chaque année, 96 % le sont sur ce continent.

Les belles récoltes des côtes bretonnes

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En France, les entreprises qui les exploitent privilégient la collecte. Il est vrai que les côtes bretonnes abritent l'une des plus belles forêts d'algues du monde avec près de 800 espèces. « Nous travaillons avec une flottille de 40 bateaux goémoniers qui prélèvent la ressource au large », précise Frédéric Faure, directeur général d'Algaia, l'une des deux grandes usines de production d'alginates bretonnes, rachetée à Cargill en 2017.

L'entreprise s'intéresse surtout aux Laminaria digitata et hyperborea. « Avec 40.000 tonnes par an, nous sommes le premier récoltant français et le deuxième européen après la Norvège », assure Frédéric Faure. L'entrepreneur s'empresse de préciser qu'en France la ressource est gérée de manière très stricte et qu'on ne prélève que 4 à 5 % du total. Mais Philippe Potin est moins rassurant. « Sur certaines zones comme l'archipel de Molène, la pression est beaucoup plus forte », regrette-t-il.

Himanthalia lorea et Laminaria saccharina. Cyanotypes réalisés par la photographe et botaniste Anna Atkins pour un herbier paru en 1843. 

Himanthalia lorea et Laminaria saccharina. Cyanotypes réalisés par la photographe et botaniste Anna Atkins pour un herbier paru en 1843. © SSPL/National Media Museum/Leemage

La récolte en bord de mer pose d'autres problèmes. C'est l'option choisie en particulier par Olmix, une grosse PME créée dans les années 1970 et qui s'est beaucoup développée à l'international en vendant des produits de santé animale à base d'algues et d'argiles. « Nous prélevons et exploitons 7.000 à 8.000 tonnes par an », précise le fondateur, Hervé Balusson. L'entreprise fait appel à des prestataires qui récoltent la ressource sur la rive dans moins d'un mètre d'eau à l'aide d'un tracteur dont l'avant est équipé d'un tapis roulant.

Mais cette activité fait aussi l'objet de critiques. « Certains riverains considèrent qu'elle traduit le manque de volonté politique d'agir sur les causes du phénomène d'eutrophisation responsable des marées vertes et qu'elle doit donc être remise en question », explique Philippe Potin. Bref, ne parier que sur la ressource naturelle dont la quantité est susceptible de varier d'une année à l'autre peut, à terme, s'avérer risqué. D'autant que si, en Bretagne, on subit la prolifération des algues , ailleurs dans le monde le réchauffement climatique a plutôt réduit la ressource. « L'Australie et la Nouvelle-Zélande ont perdu près de 50 % de leurs forêts d'algues », note Philippe Potin.

Techniques d'ensemencement

Fort heureusement, la France a d'ores et déjà entamé le virage de la culture. Même si on est encore loin des grandes exploitations asiatiques, avec ses deux concessions de 150 et 200 hectares, situées à Lesconil et Moëlan-sur-mer, Algolesko fait déjà figure de plus grande ferme d'algues d'Europe . L'aventure n'a pas été de tout repos pour Philippe Legorjus, qui préside l'entreprise. « Il a fallu du temps pour maîtriser les techniques d'ensemencement dans notre écloserie à terre, ainsi que pour mettre au point le bon dispositif de 'filaires' lestées à 20 m de fond, capable de supporter le poids des cultures et de résister aux assauts des tempêtes », explique-t-il. Mais tout est désormais fonctionnel.

Cette année, la ferme a récolté 150 tonnes, principalement du wakamé, du kombu royal et de la laminaire sucrée. « Nous visons les 1.000 tonnes dans trois ans », avance, enthousiaste, cet ancien commandant du GIGN qui entend aussi développer l'aquaculture multitrophique en partenariat avec des ostréiculteurs.

Marée verte sur une plage des Côtes d'Armor à marée basse.

Marée verte sur une plage des Côtes d'Armor à marée basse.© Laurent Grandguillot/REA

Accroître la productivité

A l'inverse des macroalgues qui peuvent être récoltées, leurs cousines microscopiques, invisibles à l'oeil nu, n'ont d'autres alternatives pour être exploitées que d'être cultivées. Tous les acteurs qui se lancent dans l'entreprise sont confrontés au même problème : la productivité du dispositif. Et donc son coût. 

Issue de l'université de Nantes, la plate-forme de recherche AlgoSolis à Saint-Nazaire a planché sur un arsenal très varié d'équipements de culture. « La méthode la plus classique consiste à placer des 'inoculums' dans des 'raceways', de grands bassins ouverts exposés à la lumière du jour et équipés d'une roue à aube pour créer un mouvement dans l'eau, décrit Jack Legrand, professeur émérite en génie des procédés qui a été à l'origine de cet équipement unique en Europe. Les microalgues vont alors se développer par division cellulaire. »

Mais avec ce type de dispositif, on ne peut produire en moyenne que 50 tonnes par hectare et par an. Insuffisant pour des applications qui ont besoin de gros volumes comme les biocarburants, car il faudrait monopoliser des kilomètres carrés de cultures. C'est ce qui explique que, pour l'instant, les microalgues sont surtout exploitées dans des applications à forte valeur ajoutée comme dans les compléments alimentaires à base d'oméga 3, sous forme de pigments pour l'industrie alimentaire ou encore dans les produits cosmétiques.

Culture en photobioréacteurs

Mais les techniques de culture sont en train d'évoluer. Certains industriels utilisent déjà des « photobioréacteurs » à structure verticale ou tubulaire. C'est le cas de Microphyt, spécialisé dans les ingrédients pour la nutrition et la cosmétique, qui vient de décrocher une subvention de 15 millions d'euros auprès de la Commission européenne et du Consortium des bioindustries afin de construire la plus importante bioraffinerie de microalgues au monde. « L'avantage de ces dispositifs, c'est d'avoir une emprise au sol beaucoup moins grande », souligne Jack Legrand. Encore faut-il réussir à les alimenter en lumière et en carbone. Pour faire 1 kg de biomasse, il faut 1,6 kg de CO2. La plate-forme AlgoSolis a breveté un système de culture sur un film d'eau qui permet d'obtenir des rendements beaucoup plus importants, jusqu'à 20 g par litre contre 1 à 2 g pour les « raceways ». 

Biofilms

Inalve prétend aller beaucoup plus loin. Cette start-up installée dans l'Ecovallée de la plaine du Var a repris un brevet de l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) pour développer un dispositif capable de produire jusqu'à 200 g par litre. Le procédé utilise des biofilms installés sur des rouleaux qui tournent dans des bassins. Cette entreprise n'a donc pas peur de viser le marché de l'aquaculture et de l'alimentation animale pour lequel elle va devoir produire de gros volumes.

« 23 tests sont en cours avec des partenaires industriels pour évaluer l'efficacité de notre concentré de microalgues, riche en protéines, lipides et sucres complexes, explique le PDG, Christophe Vasseur. Nous prévoyons le lancement de la ferme commerciale sur plusieurs dizaines d'hectares pour 2024. »

Cercle vertueux

Les photobioréacteurs développés par Suez en partenariat avec Fermentalg s'appuient sur un modèle encore différent. Au départ, les deux partenaires cherchaient surtout à mettre au point des systèmes susceptibles de capter le carbone et nettoyer l'atmosphère. Des démonstrateurs ont ainsi été installés dans des cours d'école ou sur des sites industriels. Mais la ressource en CO2 s'est révélée soit trop diluée soit trop polluée pour envisager des dispositifs de production de microalgues.

Via leur nouvelle coentreprise CarbonWorks, Suez et Fermentalg visent désormais en priorité le marché des méthaniseurs qui rejettent un carbone pur à 90 %. « Nous venons d'installer le premier équipement préindustriel d'une capacité de 10 m3 sur le site de méthanisation de Cestas, en Gironde », indique Jérôme Arnaudis, responsable des activités qualité de l'air chez Suez. En plus de limiter les rejets de carbone, ces dispositifs vont permettre de produire une microalgue utilisée par la start-up girondine Immunrise dans un produit de biocontrôle pour la vigne. Un vrai cercle vertueux !

Culture de spiruline au Mexique. 

Culture de spiruline au Mexique. © Cesar Rodriguez/Bloomberg

Extraction de nouveaux principes actifs

Mais le développement de la filière passera nécessairement aussi par l'identification et l'extraction de nouveaux principes actifs. Là aussi, les choses avancent. De fait, les usines d'Olmix et d'Algaia sont devenues de véritables bioraffineries. « Hier, on n'exploitait que les alginates, soit 20 à 30 % de notre biomasse, raconte Frédéric Faure. Aujourd'hui, nous sommes capables d'aller chercher une dizaine de molécules d'intérêt avec des applications très variées. Le processus d'extraction est construit de telle sorte que le résidu d'une opération devient la matière première de la suivante. » Les deux entreprises ont pu ainsi se diversifier notamment vers le marché des biopesticides et des biostimulants pour l'agriculture. « Les exploitants sont en attente de solutions alternatives aux intrants chimiques », assure Hervé Balusson.

En parallèle de ces approches généralistes, on voit aussi se multiplier les start-up qui parient sur des applications spécialisées. Tant dans les macro que dans les microalgues. Eranova a jeté son dévolu sur le marché des plastiques d'emballage pour l'industrie alimentaire et cosmétique. Installée sur la zone portuaire de Fos-sur-Mer, cette entreprise veut non seulement utiliser les algues vertes qui s'échouent dans l'étang de Berre mais aussi développer sa propre production en bassins. « Pour l'instant, nous avons installé un démonstrateur sur un hectare et une petite bioraffinerie de 500 tonnes, détaille le PDG, Philippe Lavoisier. Mais nous sommes en négociations avancées pour pouvoir disposer de 50 hectares sur le site avec une unité industrielle capable de traiter 28.000 tonnes. » Car Eranova voit grand.

Spiruline superstar

C'est sans doute la microalgue la plus connue du grand public et dont la production a enregistré la plus forte croissance ces dernières années. Pourtant, la spiruline n'est pas une microalgue à proprement parler, mais une cyanobactérie photosynthétique. Peu fragile, elle est facile à cultiver et n'a pas besoin de gros apports en carbone. Près de 200 fermes la produisent aujourd'hui en France. Ses fortes teneurs en protéines, fer, bêta-carotène, oméga 6 et autres vitamines en font un véritable superaliment. Mais on commence aussi à s'intéresser à ses vertus médicales. AlgoSource, qui propose déjà une gamme d'ampoules de soins antioxydants, vient de lancer une étude avec le CHU de Nantes pour évaluer les effets d'un concentré de spiruline dans la prévention des effets secondaires des chimiothérapies. « Un domaine où il n'y a pas encore de solutions », assure son président, Olivier Lépine.

Du médical à l'alimentaire 

Olgram n'aura au contraire besoin que de quelques centaines de kilos de principe actif pour servir son marché. Cette autre start-up vise, il est vrai, une application médicale. « Nous avons repris les recherches d'une équipe de l'université de Nantes qui a démontré les effets bénéfiques d'une molécule extraite de l'Ulva armoricana sur les immunodépressions suite à de traumatismes crâniens », explique le directeur général, Pierre Rocheteau. Même si on n'en est encore qu'aux études précliniques, c'est un marché qui concerne potentiellement près de 5 millions de personnes en Europe et aux Etats-Unis. 

Algama creuse pour sa part le sillon alimentaire. Jusqu'à aujourd'hui, les algues étaient consommées soit en condiments pour des salades ou des pâtes, soit en poudre dans la fabrication de chips ou de pains, soit encore sous forme de texturants, par exemple dans le jambon. Mais cette start-up a trouvé le moyen de fabriquer une poudre à base de microalgues capable de remplacer les oeufs dans la fabrication de mayonnaise, de brioches ou de cookies. « Nous travaillons également sur des recettes de saumon ou de thon végétal qui auraient la même texture et les mêmes apports énergétiques que les originaux », indique Jean-Paul Cadoret, directeur scientifique de l'entreprise.

Appel à projets international

Pour cet expert, qui est aussi président de l'European Algae Biomass Association, le développement de la filière va venir de cette effervescence de nouvelles applications. « C'est la valeur ajoutée apportée par ces produits qui va permettre d'augmenter les volumes », assure-t-il. Reste que beaucoup de ces projets sont encore au stade préindustriel. « Pour grossir, la filière a aussi besoin d'investisseurs qui croient dans son potentiel de développement », appuie Philippe Legorjus.

Pour accélérer le processus, la Fondation Lloyd Register vient de lancer, en partenariat avec le Pacte mondial des Nations Unies (UN Global Compact), un appel à projets international dans tous les champs de l'exploitation des algues. « Nous allons essayer de convaincre les grands industriels de l'alimentaire ou du packaging de nous rejoindre sur des cofinancements », explique Philippe Potin, qui coordonne pour le compte du CNRS les comités de pilotage et de sélection où l'on retrouve de grands groupes comme Nestlé ou Metro.

Dans un autre domaine, la fondation Océans 2050 créée par Alexandra Cousteau a lancé une étude auprès d'une vingtaine de fermes dans le monde afin d'établir scientifiquement que la culture d'algues permet l'enfouissement dans les sédiments sous-jacents d'une grande quantité de carbone. « Nous pourrons dès lors construire un dispositif de crédits carbone qui permettrait à de grandes entreprises d'investir dans ce genre d'exploitations », ambitionne la petite fille du célèbre commandant. C'est la condition sine qua non pour qu'éclose un écosystème complet, permettant enfin à cette ressource d'être à la hauteur de ses incontestables promesses.

L'échec des plans « marées vertes »

Dans un jugement du 4 juin dernier, le tribunal administratif de Rennes vient d'enjoindre à l'Etat de renforcer son programme d'action contre la pollution des eaux par les nitrates responsables des marées vertes. Il donne quatre mois au préfet pour revoir sa copie. Force est de constater que, malgré les 110 millions d'euros investis en dix ans et les efforts réalisés par les exploitations agricoles, les résultats ne sont pas au rendez-vous. « L'impact varie d'une baie à l'autre, nuance Stéphanie Pédron, directrice du Ceva (Centre d'étude et de valorisation des algues), en charge de la surveillance de ce phénomène. Les paramètres environnementaux, comme la transparence ou la température de l'eau, jouent aussi beaucoup. Il faut lutter contre la prolifération excessive. Mais on n'empêchera jamais une prolifération naturelle, qui est tout à fait normale et saine. »

Stefano Lupieri

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